Alors que d'un côté, Jean-Louis Borloo serine qu'il est indispensable de donner une impulsion à la croissance verte en soutenant les produits les plus vertueux, face à lui, le ministère des Finances pointe du doigt le déficit budgétaire occasionné par la mise en œuvre du mécanisme pour les véhicules.
Bonus malus : la frilosité de Bercy
Depuis décembre 2007, un bonus de 200 à 1.000 euros pour les voitures émettant moins de 130 grammes de CO2 et un malus de 200 à 2600 € est prélevé pour tout achat de véhicule émettant plus de 161g de CO2/km. Un « super bonus » de 300 € est également prévu pour tout achat d'un véhicule bénéficiant d'un bonus s'accompagnant du retrait d'un véhicule de plus de 15 ans.
Problème : selon Bercy, le système de bonus malus appliqué à l'achat de véhicules neufs a engendré un déficit budgétaire de 140 millions d'euros depuis sa mise en oeuvre. Conjugué à l'envolée du prix du litre d'essence, les achats se sont en effet massivement déplacés vers les modèles les plus économes, avec 44 % des ventes contre moins de 30 % avant la mise en place du bonus malus. Trop de bonus versé, pas assez de malus récolté, le système qui visait à être équilibré au niveau budgétaire a été victime de son succès !
Pour parvenir à l'équilibre budgétaire, le MEEDDAT a un temps envisagé d'abaisser à 120 g de CO2 / km le seuil permettant de bénéficier du bonus. Une proposition rapidement abandonnée afin de ne pas pénaliser les consommateurs. Le gouvernement a alors envisagé d'augmenter le montant des malus, entraînant une levée des boucliers des constructeurs automobiles.
En attendant que Jean-Louis Borloo revoie sa copie, Bercy a affiché sa frilosité quant à l'extension du système à d'autres catégories de produits. Interrogée lors du Grand Jury RTL – Le Figaro – LCI, la ministre de l'Economie Christine Lagarde a insisté sur le fait que le mécanisme devait être neutre fiscalement, faisable et efficace : on ne peut pas payer des tonnes de bonus et encaisser un tout petit résiduel de malus.
Le ministre du Développement durable assure de son côté que le consensus budgétaire peut être rendu possible en travaillant sur la neutralité du système. Un mauvais produit doit financer le bon, a-t-il déclaré, ce qui permettrait de parvenir globalement à l'équilibre au niveau budgétaire.
De nombreuses questions en suspens quant à l'extension du bonus malus
Si, selon Jean-Louis Borloo, le principe de l'extension du bonus malus à d'autres familles de produits est acquis, il reste à définir la liste des nouvelles cibles et avec elles, les modalités de calculs qui décideront si un produit et vertueux ou pas. Car la vraie difficulté réside là : comment définir des normes de calculs indiscutables, comment mesurer de façon scientifique l'impact d'un produit ? Faut-il prendre en compte son transport, son impact environnemental du berceau à la tombe ?
Autre réserve : le pouvoir d'achat. Comment ne pas pénaliser les consommateurs en cette période de forte tension sur le pouvoir d'achat ? Les détracteurs du bonus malus écologique soulignent en effet le risque de faire porter aux citoyens les moins avantagés le coût de cette révolution écologique.
Enfin, les modalités de mise en œuvre du dispositif restent à définir. Selon le quotidien Les Echos du 10 septembre, l'architecture du futur mécanisme passera par la création de nouvelles taxes et la distribution de coupons de réduction. (…) Côté malus, les réflexions sont plus avancées. L'idée est de créer une nouvelle taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) pour chaque famille de produits visée. Celle-ci sera payée directement par les industriels, libre à eux de reporter ou non l'augmentation sur la facture. L'argent pourra alors être versé dans des fonds d'aide à l'acquisition de produits plus vertueux.
Si une vingtaine de produits (électro ménager, téléviseurs, ampoules) devaient être concernés dans un premier temps par l'extension du bonus malus, on s'orienterait aujourd'hui vers un nombre plus limité de cibles.
Le principe devrait être validé d'ici fin septembre, lors de l'examen du projet de loi de Finances 2009.