Alors que la phase finale des discussions en groupe de travail est engagée, l'Alliance, la Fondation Nicolas Hulot et France nature environnement (qui fédère la plupart des associations française de protection de la nature) ont adressé une lettre ouverte au Ministre d'Etat Jean-Louis Borloo concernant la méthodologie retenue par le gouvernement pour le déroulement du Grenelle de l'Environnement. Les associations demandent notamment des précisions sur la restitution des travaux conduits par les groupes de travail, sur l'organisation de la consultation publique et de la négociation finale.
Rappelons que le Grenelle de l'environnement lancé le 6 juillet et demandé par le Président de la République, doit aboutir à un plan d'action de 20 à 30 mesures concrètes et quantifiables. Les propositions sont élaborées par six groupes de travail qui se penchent chacun sur un thème : la lutte contre le changement climatique, la préservation de la biodiversité et des ressources naturelles, l'instauration d'un environnement respectueux de la santé, l'adoption de modes de production et de consommation durables, la construction d'une démocratie écologique, la promotion de modes de développement écologique favorables à la compétitivité et à l'emploi. Il est prévu que les groupes se réunissent quatre fois jusqu'en septembre, avant de rendre leurs préconisations en vue d'un rapport de synthèse le 27 septembre. Six réunions régionales et un débat sans vote devraient ensuite avoir lieu à l'Assemblée nationale et au Sénat. Le public pourra en outre s'exprimer via Internet. Une réunion finale aura lieu fin octobre, ouvrant selon les sujets, sur un processus législatif ou sur la mise en place de programmes opérationnels au nombre de quinze ou vingt. Un projet de loi de programmation sur les conséquences du Grenelle sera ensuite probablement soumis avant Noël au Parlement, ainsi que d'autres projets de loi en attente (responsabilité environnementale et OGM).
Mais les associations environnementales veulent que les recommandations qui sortiront des groupes de travail, fin septembre, fassent l'objet d'une négociation et soient validées par les participants. De ce fait, elles demandent qu'une version de travail soit soumise par les rapporteurs à l'ensemble des représentants des cinq collèges, au moins 3 jours avant la tenue de la dernière séance plénière, afin que les différentes parties prenantes puissent en prendre connaissance et faire part de leurs commentaires avant la dernière plénière. Elles regrettent de n'avoir à ce jour aucune visibilité sur les modalités pratiques concernant les réunions de consultation en régions. Pourtant les associations de protection de l'environnement locales doivent être impliquées dans l'organisation de cette consultation publique, soulignent-t-elles. Elles demandent en outre que soient arrêtées, en concertation avec les associations, les modalités de la négociation finale. Si le gouvernement n'adopte pas des mesures drastiques qui permettront une vraie transformation de la société, ce Grenelle sera un échec, a prévenu Daniel Richard, président de WWF France.
Notons encore qu'en ce qui concerne les organismes génétiquement modifiés (OGM), qui font l'objet d'un intergroupe de travail spécifique, le risque de blocage est bien réel, puisque les associations exigent à minima un moratoire sur les cultures en plein champ.
Les associations membres de l'Alliance pour la planète ont par ailleurs présenté les mesures phares qu'elles défendent dans le cadre du Grenelle de l'environnement.
Outre le moratoire sur les cultures d'OGM en plein champ, l'abandon de l'EPR, la réduction de l'utilisation des pesticides, l'interdiction des ampoules à incandescence, la promotion de l'agriculture biologique, la création d'un statut protégeant les lanceurs d'alerte, la lutte contre la pêche pirate figurent parmi les propositions.
Concernant l'efficacité énergétique des bâtiments, l'alliance préconise notamment pour les constructions neuves, de fixer des seuils de performance de plus en plus faible pour atteindre 50 kWh/m2 de consommation annuelle pour le chauffage et l'eau chaude et pour l'habitat existant, ainsi qu'une nouvelle réglementation qui impose, à l'occasion de chaque transaction immobilière (vente ou location), une rénovation thermique avec un objectif de 80 kwh/m2/an. En outre, les ONG souhaitent la mise en place par le secteur bancaire de prêts adaptés à la rénovation thermique et la Mise en place par la Caisse des dépôts d'outils financiers appropriés, destinés aux collectivités locales et aux offices HLM. Rappelons qu'un dispositif de prêts bonifiés pour l'efficacité énergétique est actuellement développé dans certaines régions comme la Picardie. L'Allemagne a en outre lancé un vaste programme de rénovation depuis quelques années.
Pour les transports, différentes pistes sont étudiées : baisse généralisée des vitesses sur les routes, réduction de la consommation unitaire des véhicules pour doubler leur efficacité en 10 ans, moratoire sur les projets d'autoroutes et d'aéroports, éco-redevance sur les marchandises, bonus-malus sur les véhicules particuliers et favoriser les modes de transports sobres en carbone. Afin de financer les modes de transport alternatifs à la route et à l'avion, il faut doter l'AFITF (Agence de financement des infrastructures de transport de France) de moyens financiers conséquents, préconise l'alliance. Pour cela, il est possible d'affecter à l'Agence le produit des nouvelles écotaxes ou éco-redevances sur le transport routier et aérien, dont les ressources ne sont pas assurées au-delà de 2009, notamment pour le financement des réseaux ferré et fluvial, ainsi que du transport combiné, ajoute le collectif d'associations. Pour l'alliance, la réduction annoncée du fret ferroviaire constitue donc un mauvais signal envoyé par la SNCF.