Le décret précisant les conditions d'affichage d'une mention "sans OGM" ou "nourris sans OGM" a été publié mardi 31 janvier au Journal Officiel. Ainsi à compter du 1er juillet prochain les opérateurs de l'agroalimentaire pourront valoriser certains produits issus d'une filière dite "sans OGM".
Certains ingrédients végétaux pourront ainsi être étiquetés "sans OGM" s'ils ne contiennent pas plus de 0,1% d'ADN génétiquement modifié issu d'une contamination accidentelle. Mais cette étiquette ne sera apposée que sur les végétaux pour lesquelles il existe une espèce OGM sur le marché de l'UE. Ce sera le cas pour le maïs ou le soja mais pas pour la salade ou la courgette par exemple.
Pour les ingrédients d'origine animale, plusieurs étiquettes sont possibles suivant le type d'ingrédient et le niveau de garantie apporté par les producteurs. Les ingrédients non transformés provenant d'animaux alimentés par des végétaux "sans OGM" pourront être étiquetés "nourris sans OGM 0,1%" ou "issus d'animaux nourris sans OGM 0,1%" pour le lait ou les œufs. La même règle s'applique pour les ingrédients transformés.
Si le producteur ne nourris pas ses animaux avec des OGM mais ne peut pas garantir que son alimentation est "sans OGM", il pourra étiqueter ses produits d'une mention "nourris sans OGM 0,9%" ou "issus d'animaux nourris sans OGM 0,9%". Autrement dit, rien ne garanti que le taux d'ADN présent dans l'aliment soit inférieur à 0,1% mais les conditions d'exploitation garantissent que ce taux n'excède pas 0,9%, c'est-à-dire le seuil d'étiquetage "avec OGM" demandé par l'UE.
Pour les ingrédients issus de l'apiculture (miel, pollen, gelée royale), les ruches ne doivent pas être installées à moins de trois km d'un champ OGM pour que l'apiculteur puisse étiqueter "sans OGM dans un rayon de 3 km" et ce pendant un an.
Un étiquetage discret… ?
Malgré le progrès que représente ce décret en terme d'information du consommateur il n'est pas dit que cet étiquetage favorisera le maintien d'une culture "sans OGM". En effet, les critères d'étiquetage le rendent peu lisible et applicable à un nombre restreint de produits. Toutes ces précisions ne sauteront pas aux yeux des consommateurs puisqu'elles doivent être apposées dans la liste des ingrédients. L'étiquetage ne sera visible sur la face avant du produit que pour les aliments dont l'ingrédient principal représente plus de 95%. "Jusqu'au dernier moment, les lobbies pro-OGM se sont agités pour empêcher ou minimiser la possibilité pour le citoyen-consommateur de manifester ses choix", estime l'association Inf'OGM. De plus, le décret n'autorise pas l'affichage du "nourri sans OGM" aux produits issus d'élevage nourris à l'herbe.
…et inopérant ?
Par ailleurs, selon ce nouveau décret, le mécanisme d'étiquetage de nombreux produits va reposer sur la production de végétaux "sans OGM" respectant un seuil de 0,1%. Mais cette production va dépendre des règles de coexistence entre les filières OGM et non OGM que la France va mettre en place sur son territoire. Le haut conseil en biotechnologies a publié un avis sur ce sujet le 17 janvier dernier. Pour garantir des productions végétales "sans OGM", il recommande la mise en place d'une stratégie collective qui permette de négocier localement en fonction de la situation des mesures de coexistence nécessaires. "Il est essentiel d'adapter les conditions techniques aux situations locales et aux objectifs recherchés. Ceci est particulièrement important pour les espèces allogames comme le maïs pour lesquelles les facteurs pouvant affecter la présence fortuite d'OGM dans d'autres productions sont nombreux", peut-on lire dans l'avis.
Pourtant un projet d'arrêté du ministère de l'agriculture, que l'association Inf'OGM s'est procuré, défini non pas des zones de concertations locales comme le préconise le HCB mais des distances d'isolement entre les parcelles. La dizaine d'articles que compte ce document précise que les parcelles de maïs OGM devront être éloigné de 50 mètres minimum des parcelles de maïs non OGM ou être entourées d'une bande de 9 mètres de large de maïs non OGM. La distance est réduite à 5 mètres pour les cultures de pommes de terre OGM et de soja OGM et aucune distance n'est prévue pour la betterave sucrière. Un nettoyage des matériels est demandé lors de la récolte, du transport et du stockage des produits OGM ainsi qu'un suivi documentaire via un formulaire qui suivra les différentes étapes de culture. Rien de plus, rien de moins.
Or selon le HCB, ces conditions de culture ne permettront pas de garantir une production végétale "sans OGM 0,1%" mais seulement une production "sans OGM 0,9%". De même, rien n'est précisé dans l'arrêté sur la coexistence des champs OGM avec les ruches. Autant d'éléments qui réduisent comme peau de chagrin l'ambition de l'étiquetage "sans OGM".