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Comme son nom l'indique, la cogénération consiste à produire simultanément dans la même installation de l'énergie thermique (chaleur) et de l'énergie mécanique, transformée en énergie électrique par un alternateur. Cette production simultanée de chaleur et d'électricité permet d'atteindre des rendements élevés, de 75 à 85 %, et d'économiser ainsi 5 à 20 % d'énergie primaire.
Alors que l'énergie thermique peut-être utilisée pour le chauffage et la production d'eau chaude, l'électricité sert pour les besoins de l'installation ou est revendue sur le marché de l'électricité. Le gaz, le fioul, la biomasse ou la valorisation des déchets (incinération) peuvent être utilisés pour faire fonctionner ce type d'installation. Aujourd'hui, la plupart des équipements de cogénération se trouvent dans l'industrie, le tertiaire et les réseaux de chaleur urbains.
La place de la cogénération en France
Technologie plutôt ancienne, la cogénération ne s'est vraiment développée en France qu'à partir des années 90, avec la mise en place d'un cadre juridique, fiscal encourageant les investissements dans ces équipements. Un régime d'obligation d'achat de l'électricité produite a notamment été mis en place en 1997. Pourtant, le développement de la cogénération en France reste en deçà du niveau européen. Elle représenterait aujourd'hui en France 4 % de la production d'électricité (7 % en hiver, saison où la cogénération est la plus utilisée) contre 9 % de la production nationale en Allemagne et 43 % aux Pays-Bas ! Selon une étude réalisée par le CEREN (centre d'études et de recherches économiques sur l'énergie) en 2003, le parc des équipements de cogénération existant au 31 décembre 2003 en France était estimé à 1.488 équipements, d'une puissance totale électrique de 6 669.MW et chaleur de 20 489 MW. La production annuelle d'énergie était de 25,3 TWh d'électricité et de 68 TWh de chaleur pour une consommation de combustibles de 120 TWh (10,3 Mtep).
Le développement restreint de la cogénération en France s'explique en partie par la situation particulière nationale où près de 80 % de la production d'électricité est d'origine nucléaire. Mais à l'heure où la plupart des pays s'orientent vers une diversification de leur mix énergétique, la place de la cogénération fait débat en France.
Les atouts de la cogénération
La production simultanée de chaleur et d'électricité présente de nombreux atouts. Tout d'abord, c'est un dispositif d'économie d'énergie : l'énergie thermique dissipée lors de la production d'électricité est récupérée, ce qui permet d'obtenir des rendements de production d'énergie équivalents à 75 à 85 % contre 40 à 50 % pour une centrale thermique classique. La cogénération permet donc des économies d'énergie primaire par rapport à des productions distinctes d'électricité et de chaleur. En effet dans un process de combustion environ 30% à 40% de l'énergie primaire peuvent-être transformés en énergie électrique, tandis que 50 à 60% se retrouvent sous forme de chaleur, utilisable pour alimenter un industriel ou un réseau urbain de chauffage.
Au niveau environnemental, la cogénération affiche donc un bilan positif quant aux émissions de CO2 lorsqu'elle se substitue à une production électrique réalisée à partir de combustibles fossiles. Mais en France où la production d'électricité (majoritairement nucléaire et hydraulique) est peu émettrice de gaz à effet de serre, cet argument écologique apparaît minoré.
Pourtant dans un contexte de diversification des mix énergétiques nationaux, la production d'électricité décentralisée qu'offre la cogénération serait un atout : elle peut permettre d'éviter des coûts de développement de réseaux électriques (lignes haute tension…) et des pertes lors du transport de l'électricité. Enfin, contrairement aux énergies renouvelables qui constituent souvent des sources d'énergie intermittentes, la cogénération est fiable, non sensible aux conditions climatiques et peut donc participer à faire face aux pointes de consommation d'électricité.
Les freins au développement de la cogénération
Malgré ces atouts, l'efficacité de la cogénération, notamment d'un point de vue économique, n'est pas toujours avérée. Le coût élevé de l'investissement, le faible coût de l'électricité en France constituent un frein à sa rentabilité. La cogénération s'avère rentable dans les industries dont les process utilisent l'eau chaude, la vapeur ou l'air chaud qui peuvent ainsi être valorisés ou sur des sites où les besoins simultanés de chaleur et d'électricité (ou de force motrice) le justifient. Pour les réseaux de chaleur, l'énergie doit nécessairement être distribuée dans un secteur limité, proche du lieu de production, le transport de la vapeur produite étant impossible. Ce système se développe donc principalement dans les grands ensembles immobiliers (tertiaire, logements sociaux…).
Un rapport réalisé en 2007 par l'Inspection générale des finances et du Conseil général des mines jugeait que les conditions à satisfaire pour tirer le meilleur parti de l'intérêt écologique et économique de la cogénération au gaz naturel ne sont actuellement pas réunies en France.
Et de s'interroger sur la pertinence de soutenir ce mode de production d'électricité au vue de ses coûts.
Pour Benjamin Gallezot, sous directeur des marchés de l'énergie et des affaires sociales à la Direction générale Energie et Climat du MEEDDAT, l'intérêt de la cogénération doit s'apprécier dans le cadre d'un mix d'énergies. Tout comme la plupart des sources d'énergie alternatives explorées aujourd'hui…