Quelles sont les substances pertinentes à surveiller dans les eaux de surface (1) ou celles d'intérêt émergent (2) pour lesquelles la priorité doit être donnée pour la période 2022 à 2027 ? Pour répondre à cette question, l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris), avec l'appui de l'Office français de la biodiversité (OFB) a étudié les données de surveillance (3) obtenues précédemment. Son analyse fournit des éléments pour la révision des listes de substances. La mise à jour de ces dernières est en cours.
Dans le cadre des programmes de surveillance des eaux de surface en France, trois listes sont en effet utilisées : la liste des substances (dangereuses) prioritaires identifiées à l'échelle européenne pour l'évaluation (4) de l'état chimique des masses d'eau, la liste des polluants spécifiques de l'état écologique (PSEE) qui contribuent à l'évaluation de l'état écologique, et la liste des substances pertinentes à surveiller (SPAS).
Pour faire un point concernant cette dernière catégorie, l'Ineris a analysé les données de 102 substances dans l'eau et les sédiments, en métropole et dans les départements et régions d'outre-mer (Drom).
Les métaux, métalloïdes et minéraux à la première place
Par rapport aux concentrations prévisibles sans effets sur le milieu connues, l'institut n'a identifié aucune substance très critique dans l'eau. En revanche, plusieurs sont « moyennement critiques » : les cyanures libres, l'argent, la diméthénamide, le métolachlore, l'atrazine déséthyl, le diclofénac et la carbamazépine, pour la métropole, ainsi que le métolachlore, l'imidaclopride, la carbamazépine, l'oxazépam et le diclofénac pour les Drom. Concernant les sédiments, le sélénium apparaît comme très critique à la fois sur le territoire hexagonal, comme dans les Drom.
Étant donné les incertitudes sur les concentrations prévisibles sans effets de certains métaux, métalloïdes et minéraux, l'Ineris a déterminé des indicateurs d'alerte à partir de la littérature scientifique. « L'interprétation de ces résultats doit rester prudente », met-elle en garde.
En métropole, à travers ce prisme, l'aluminium, le fer, l'uranium, le sélénium, le baryum, l'étain, le manganèse et le lithium se distinguent comme substances très critiques dans l'eau. Concernant les sédiments, ce sont l'aluminium, le manganèse, l'arsenic, le cuivre, le baryum, l'étain, le zinc et le chrome, qui émergent.
Dans les Drom, dans l'eau, les substances très critiques sont l'aluminium, le fer et le sélénium et, dans les sédiments, le manganèse, le baryum et l'étain.
Les acides benzène alkyl sulfoniques : futures substances pertinentes à surveiller ?
« Les critères de sélection appliqués pour la priorisation sont plus nombreux que les seuls niveaux d'imprégnation des milieux et indicateurs d'alerte déterminés dans cette étude, pointe l'Ineris. Il peut cependant être envisagé (…) que les substances identifiées comme « moyennement critiques » dans l'eau au regard du dépassement de la PNEC soient candidates à l'inclusion dans la liste des futurs polluants spécifiques de l'état écologique (PSEE). »
L'Ineris s'est également penché sur les données de 53 substances d'intérêt émergent (36 biocides et 17 surfactants) dans les eaux de surface, les sédiments, les matières en suspension, les eaux de rejet et les boues de stations d'épuration en métropole et dans les Drom.
Parmi les substances misent en lumière figurent les acides benzène alkyl sulfoniques (LAS). Ces derniers sont à la fois les plus retrouvés, mais également ceux dont les concentrations sont les plus élevées dans l'eau et les sédiments.
Autre polluant pointé par l'Ineris : la méthyl nonyl kétone, la plus fréquemment quantifiée dans les échantillons de sédiments de métropole et des Drom et qui présentait les concentrations médianes les plus élevées.
Finalement, par rapport aux concentrations prévisibles sans effets sur le milieu, deux acides benzène alkyl sulfoniques ressortent plus particulièrement : les C12 et C13. « On les retrouve notamment dans des produits de lavage et de nettoyage, des cosmétiques et des produits de soins personnels », détaille l'Ineris.
Ensuite, les substances identifiées comme faiblement à fortement critiques au regard du dépassement de PNEC pourraient devenir des substances pertinentes à surveiller (SPAS) dans le cadre du prochain cycle de surveillance (5) DCE (2022-2027).
Les nouvelles listes devraient être finalisées à la fin de l'année et publiées début 2022.