Le 23 juillet, le Conseil d'Etat a rejeté le recours déposé il y a un an par l'association Sauvons le climat (SLC) afin de faire annuler l'arrêté du 30 avril 2013 fixant la méthode de calcul Th-BCE 2012 relative à la réglementation thermique 2012 (RT 2012). Par ailleurs, l'association est condamnée à verser à l'Etat une somme de 2.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans sa décision (1) , le Conseil d'Etat a estimé que l'Etat n'est pas constitutionnellement tenu de moduler le seuil de consommation d'énergie primaire prévu dans la RT 2012 en fonction des émissions de gaz à effet de serre associées à l'électricité employée dans un bâtiment.
"Sauvons le Climat maintient que [le choix effectué dans la méthode de calcul Th-BCE 2012] ne permet pas de respecter l'objectif de la loi et constate à cet égard que depuis le dépôt de sa requête, de nombreuses voix se sont jointes à la sienne pour dénoncer les effets de la RT 2012", indique l'association suite à cette décision, citant les critiques formulées par Alain Lambert, médiateur des normes. Elle "en appelle donc au Premier Ministre pour faire arrêter cette grave atteinte à l'environnement et adapter la réglementation aux objectifs du Grenelle pour assurer la réduction des émissions de gaz à effet de serre".
En juillet 2013, SLC avait déposé une requête en annulation pour excès de pouvoir contre l'arrêté validant la méthode de calcul Th-BCE 2012. L'association reprochait à l'arrêté de ne pas prévoir de modulation pour la consommation électrique en fonction des émissions de gaz à effet de serre, contrairement à ce que prévoit l'article 4 de la loi de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement (dite Grenelle I). Cet article prévoit notamment que "pour les énergies qui présentent un bilan avantageux en termes d'émissions de gaz à effet de serre, [le seuil de 50 kilowattheures d'énergie primaire consommée par mètre carré et par an] sera modulé afin d'encourager la diminution des émissions de gaz à effet de serre générées par l'énergie utilisée". L'association estimait que l'absence de modulation favorable à l'électricité constituait une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation.
La requête de SLC s'inscrit dans le cadre d'une tentative de remise en cause de la RT 2012 par le secteur du chauffage électrique. C'est d'ailleurs l'avocat de l'Association française des professionnels de la géothermie, association qui a intérêt à l'annulation de l'arrêté contesté, reconnaît le Conseil d'Etat, qui est intervenu en soutien de Sauvons le climat lors de la séance publique.
L'absence de portée normative des lois de programmation
Le Conseil a tout d'abord rappelé qu'au regard de l'antépénultième alinéa de l'article 34 de la Constitution, les lois de programmation "se bornent à fixer des objectifs à l'action de l'Etat et sont, dès lors, dépourvues de portée normative". En conséquence, "il ne saurait (…) être utilement soutenu que l'arrêté attaqué aurait méconnu ces dispositions", estime-t-il.
Par ailleurs, le Conseil d'Etat a expliqué que l'arrêté attaqué vient approuver la méthode de calcul prévue aux articles 4, 5 et 6 de l'arrêté du 26 octobre 2010. Or, "l'arrêté du 26 octobre 2010 prévoit, à son article 11, que la consommation conventionnelle maximale d'énergie primaire du bâtiment est déterminée notamment en fonction d'un coefficient de modulation selon les émissions de gaz à effet de serre des énergies utilisées". Le Conseil considère donc que SLC "ne saurait ainsi soutenir que ces dispositions réglementaires n'auraient pas fixé les caractéristiques et performances énergétiques au regard des émissions de gaz à effet de serre".
Le Conseil d'Etat a aussi estimé que, "contrairement à ce qui est soutenu, il ne résulte pas des dispositions [issues de la loi Grenelle I] que l'arrêté contesté aurait nécessairement dû, dans la méthode de calcul qu'il définit, retenir une consommation qui soit directement fonction de la quantité de gaz à effet de serre émise, ou prévoir une modulation spécifique pour l'énergie électrique". De même, le fait de retenir une modulation pour l'énergie bois, et non pour l'énergie électrique et pour l'énergie géothermique, ne constitue ni une erreur de droit, ni une erreur manifeste d'appréciation.
Le Conseil d'Etat rejette aussi l'argument, souvent avancé par les détracteurs de la RT 2012, selon lequel la méthode de calcul serait trop complexe. "Pour complexe qu'elle soit, la méthode de calcul (…) ne méconnaît pas l'objectif constitutionnel de clarté et d'intelligibilité de la norme", estime la Haute juridiction.