A l'occasion du Conseil des ministres du 16 novembre 2011, Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'Ecologie, et Eric Besson, ministre de l'Energie, ont présenté les exercices de prospectives énergétique à l'horizon 2050 lancés par leurs ministères respectifs.
Ruptures nécessaires pour atteindre le facteur 4
Nathalie Kosciusko-Morizet a présentée une communication relative à la stratégie de réduction des émissions de CO2 à l'horizon 2050, reprenant certaines conclusions du rapport remis au début du mois par le président du groupe de travail Trajectoires 2020-2050, le professeur d'économie à l'université Paris-Dauphine, Christian de Perthuis.
Rappelant l'objectif du facteur 4, à savoir une réduction des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2050 pour les pays développés, la ministre a tout d'abord pointé deux "atouts solides" dont dispose la France : "une production [d'électricité] parmi les moins carbonées au monde" et de la mise sur le marché des "véhicules […] les moins émetteurs en CO2 d'Europe".
Par ailleurs, "l'atteinte des engagements, pris par la France dans le cadre du protocole de Kyoto, pour 2012 est acquise, et nous sommes en bonne voie pour atteindre les objectifs 2020 définis au niveau européen", a estimé la ministre ajoutant cependant que "pour atteindre l'objectif fixé pour 2050, des ruptures de technologie et d'organisation seront nécessaires".
La taxe carbone proposée officiellement
La ministre a repris trois recommandations formulées par le rapport : renforcer les mesures de politique industrielle favorisant la transition vers une économie sobre en carbone ; agir à la fois sur la demande, en incitant à l'efficacité énergétique, et sur l'offre en encourageant les procédés de production sobres en carbone ; mettre en place des incitations économiques et réglementaires offrant une visibilité aux entreprises à moyen terme et en particulier la mise en place d'une taxe carbone et la fixation de nouveaux objectifs à l'horizon 2030 ; utiliser le produit des enchères de quotas CO2 prévues à partir de 2013 et des futures taxes carbone pour favoriser la croissance économique, l'innovation technologique, l'équité sociale et la politique climatique ; anticiper les évolutions du marché de l'emploi et préparer les transitions professionnelles.
Les consommateurs veulent être entendus
En réaction à ces présentation, la CLCV "demande un débat public décentralisé sur notre modèle énergétique", dans le cadre de la révision de la PPI.
Rappelant qu'elle siège à la commission Energie 2050, l'association de consommateurs considère que le débat sur le modèle énergétique "a trop longtemps été « capté » durant de longues années par certains corps d'experts".
"Aujourd'hui, nous sommes manifestement à un moment stratégique où des choix s'imposent", estime la CLCV précisant qu'"un tel choix de société […exige…] d'organiser un débat national décentralisé au plus près des consommateurs, usagers et citoyens, sur la base des nombreux scenarii énergétiques chiffrés".
De son côté, Eric Besson a annoncé que "l'élaboration de [la programmation pluriannuelle des investissements (PPI)] débutera en 2012 et sera précédée d'une large consultation, afin que l'ensemble des acteurs de l'énergie, consommateurs, représentants des salariés, industriels, opérateurs et associations, y contribuent".
Quant à la commission Energies 2050 chargée d'évaluer, d'ici au 31 janvier 2012, différents scénarios énergétiques pour la France à l'horizon 2050, elle réalise le travail prospectif en amont de la préparation de la PPI qui sera présentée devant le Parlement au cours de l'année 2013. Celle-ci "identifiera les investissements souhaitables dans le secteur de l'énergie au regard de la sécurité d'approvisionnement", a-t-il précisé, ajoutant qu'elle "portera en particulier sur les secteurs de l'électricité, du gaz et de la chaleur".
"Les prix de l'énergie, la protection de l'environnement, en particulier la lutte contre le réchauffement climatique, la sécurité d'approvisionnement de la France et l'acceptabilité sociétale seront évalués pour chaque scénario", a indiqué le ministre précisant que "l'analyse intégrera l'évolution de la demande d'énergie, le potentiel d'efficacité énergétique et l'offre d'énergie".
Mix énergétique ou sortie du nucléaire ?
Enfin, la transition vers une sortie progressive du nucléaire, à horizon 2050, voire 2040, ou vers une réduction progressive de la part du nucléaire, présentée initialement comme l'une des pistes de travail de la commission, n'est plus ouvertement avancée par le Eric Besson.
Le ministre a simplement précisé que "concernant plus particulièrement l'offre électrique, l'allongement de la durée d'exploitation et le rythme de passage à la troisième génération des réacteurs seront examinés tout comme le « mix » de production global", s'abstenant de préciser les scénarios étudiés en matière de mix énergétique.